À Thiès, la intensification des actions de mobilisation lancée par les travailleurs de la Justice, rassemblés au sein de l’Entente Sytjust-Untj (Syndicat des travailleurs de la Justice et Union nationale des travailleurs de la Justice), constitue un véritable casse-tête pour les populations. Ces employés de la Justice, qui se battent pour faire respecter leurs droits, obtenir la reconnaissance de leur rôle essentiel dans le fonctionnement du système judiciaire et exiger l’ouverture immédiate de négociations sérieuses avec les autorités, poursuivent une lutte qu’ils considèrent comme légitime, mais qui a des répercussions considérables sur la vie quotidienne des citoyens.
Dans la capitale du Rail, plusieurs personnes déplorent vivement l’impact dévastateur que ces mouvements de grève des greffiers des cours et tribunaux du Sénégal ont sur la qualité des services offerts à la population. Ces mouvements, qui ont déjà donné lieu à plusieurs plans d’action de grève, ont entraîné un blocage complet de l’administration administrative, provoquant de nombreux désagréments pour les citoyens. Notamment, ils empêchent la délivrance de papiers administratifs indispensables, ce qui complique la vie des usagers, en particulier des détenus, en raison de la prolongation des délibérés. La population dénonce ces greffiers, qu’elle accuse d’avoir pris les citoyens en otage, en tentant d’imposer leur volonté par la force. Certains craignent que si l’État cède à ces revendications, cela pourrait provoquer un désastre dans la gestion des autres secteurs de la fonction publique.
Un père de famille croisé devant la mairie de Thiès s’irrite face à la situation : « Trop, c’est trop. Cela impacte négativement la vie des populations, beaucoup doivent faire des kilomètres pour obtenir certains papiers, mais finissent par arriver devant des bureaux vides, ce qui leur fait perdre du temps et de l’énergie. » Abdou Faye, un autre citoyen, déplore que, si cette revendication des syndicalistes de la Justice est légitime, leur grève cause surtout un préjudice considérable aux usagers. « En plus de détériorer la qualité des services, ce qui est grave, c’est que ceux qui en souffrent le plus, ce sont les populations, surtout les plus vulnérables. Lorsqu’une grève éclate, ce sont souvent les citoyens qui se retrouvent pris en otage, victimes innocentes dans une bataille qui ne leur appartient pas, que ce soit dans la santé, l’éducation, la Justice ou d’autres secteurs », explique-t-il.
Les consommateurs également impactés par la crise
L’embarras est partagé par El Hadj Ciré Balley Diallo, président de l’antenne régionale de Sos Consommateurs à Thiès. Il exprime son inquiétude face à la situation : « Les consommateurs ont besoin d’actes administratifs urgents, mais ils sont contraints, contre leur gré, de se soumettre aux décisions des grévistes. » Selon lui, ces citoyens sont systématiquement lésés, car ils sont souvent ignorés par les autorités concernées, qui tardent à prendre des mesures efficaces et durables pour mettre fin à ces mouvements. Il souligne également que certains syndicats, par leur comportement, semblent rechercher des résultats immédiats, sans trop se soucier des conséquences à long terme.
M. Diallo poursuit : « Les populations que nous représentons sont fatiguées de subir les effets néfastes de ces grèves. » Il interpelle les acteurs institutionnels : « Qu’a-t-on fait pour que le Pacte social, qui réunissait syndicats et autres parties prenantes, ait un sens et aboutisse à des solutions concrètes ? » Il insiste sur la nécessité pour l’État de prendre ses responsabilités et d’organiser rapidement des rencontres avec les syndicats en mouvement pour définir une solution claire, crédible et durable. Il appelle aussi ces syndicats à revoir leurs stratégies de lutte afin d’adopter des démarches plus responsables, qui tiennent compte des intérêts des consommateurs et des citoyens, souvent victimes collatérales de ce conflit.
Il insiste sur l’importance pour un État responsable d’être ferme dans ses décisions, tout en rappelant qu’un syndicat qui se veut responsable doit également préserver les intérêts de la population qu’il sert. « Il faut établir un équilibre entre la juste revendication et le respect du peuple qui supporte les conséquences de ces actions », conclut-il.
Les responsabilités de l’État et des syndicats soulignées
Pour Thié Kouyaté, figure politique nationale et responsable de la vie politique du parti Union pour une nouvelle République (Unr), représentant des Sénégalais de l’extérieur, « l’État n’aurait jamais dû laisser cette situation perdurer ». Il insiste sur le fait que les greffiers, en tant que fonctionnaires, ne devraient pas se livrer à un bras de fer qui pénalise tout un peuple. Selon lui, cette bataille ne doit pas se faire au détriment du citoyen.
Il déplore que la population soit la principale victime aujourd’hui : « Les dossiers restent bloqués, les jugements sont reportés, des familles vivent dans l’incertitude et la douleur à cause de cette attente interminable. » Il affirme que « nous sommes tous les grands perdants » dans cette crise qui n’a que trop duré.
M. Kouyaté appelle fermement l’État à assumer ses responsabilités pour mettre fin à ce conflit : « Il faut que cette grève s’arrête, que la justice reprenne son cours normal, et que la population, qui a déjà beaucoup souffert, retrouve ses droits. » D’après lui, cette prolongation des grèves dans les tribunaux plonge des milliers de citoyens dans une véritable impasse, dans l’attente de jugements, de décisions pour leurs enfants ou encore de décomptes pour des détenus.
Une crise aux conséquences profondes
En conclusion, la situation à Thiès et dans d’autres régions révèle que le conflit entre les travailleurs de la Justice et l’État continue de fragiliser l’accès à la justice pour nombre de citoyens. La population, prise en otage par cette grève prolongée, subit les retards, l’injustice et la détresse silencieuse. La nécessité d’un dialogue constructif et d’une solution équilibrée apparaît aujourd’hui plus que jamais essentielle pour sortir de cette impasse et permettre à la Justice de remplir pleinement ses missions, dans le respect des droits de tous.