La fin de l’influence française en Afrique et le départ du Sénégal
Le jeudi 17 juillet 2025 marque un tournant historique pour le Sénégal, avec la dissolution officielle de la présence militaire française sur le territoire sénégalais. Cet événement symbolise la fin d’une ère pour les relations entre la France et le pays de la Teranga, un chapitre majeur de leur histoire commune qui tire sa révérence sous la nouvelle gouvernance dirigée par Bassirou Diomaye Faye et Sonko. Ce retrait ne constitue cependant qu’un aspect d’un changement beaucoup plus profond dans la dynamique des relations entre l’hexagone et ses anciennes colonies africaines.
Depuis plusieurs années, une véritable transformation s’opère, rendant obsolète le modèle paternaliste qui avait longtemps caractérisé la domination française en Afrique. Contrairement à une époque où des figures comme l’ancienne première dame de Côte d’Ivoire, Madame Simone Gbagbo, évoquaient déjà cette relation de validation des décisions par Paris dans les conseils ministériels africains, la donne a considérablement évolué. La majorité des anciennes colonies françaises ont vu leur autonomie augmenter, leur souveraineté se renforcer, et leur capacité à définir leur propre voie se confirmer. Aujourd’hui, en particulier au Sénégal, on perçoit clairement que la France a perdu une grande partie de son influence traditionnelle, et que le pouvoir politique local cherche à se libérer de cette dépendance.
Ce processus est illustré par la sortie officielle des troupes françaises du Sénégal, un geste qui témoigne de cette rupture avec le passé. La fermeture de cette page s’inscrit dans une série de démarches visant à refonder la relation entre le pays et la France, en adoptant une position plus souveraine et indépendante. Cependant, il s’agit également d’un signal envoyé à la communauté internationale et à d’autres partenaires potentiels : une nouvelle ère est en train de s’ouvrir, où l’autonomie et la dignité nationale prennent le dessus.
Une opportunité historique pour un changement radical
Ce départ constitue une étape cruciale, mais aussi une occasion unique pour le Sénégal de repenser ses alliances et ses stratégies de développement. La situation offre un contexte favorable pour renforcer les liens avec d’autres nations, diversifier ses partenaires et affirmer son identité dans un monde en pleine mutation. Le moment semble idéal pour construire une diplomatie plus équilibrée, qui privilégie la coopération mutuelle plutôt que la dépendance historique à l’égard de Paris.
C’est dans cette optique que le président Sonko n’a pas hésité à s’exprimer publiquement, notamment dans son ouvrage « Solutions », où il exprimait sa volonté de voir la France évoluer dans son attitude vis-à-vis de l’Afrique. Il soulignait alors : « Nous souhaitons que la France entende et comprenne notre message, celui d’une nouvelle Afrique, portée par une nouvelle génération politique, citoyenne, artistique, intellectuelle… qui n’aspire qu’à plus d’égalité et d’équité dans nos rapports avec elle, pour le progrès et le développement que légitimement souhaitent nos peuples. Si elle l’entend et le comprend, cela sera bénéfique pour nos relations séculaires. Sinon, elle se dirige vers une rupture brutale et irréversible avec ses anciennes colonies, qui se tourneront définitivement vers d’autres partenaires privilégiés. »
Tout porte à croire que ces propos se vérifient dans la réalité, alors que la relation avec la France est en pleine redéfinition. La dynamique actuelle montre que Paris commence à réaliser qu’elle ne peut plus maintenir son influence dans la même mesure. En conséquence, la France cherche désormais à limiter la rupture tout en conservant certains intérêts économiques et stratégiques, notamment ceux liés à ses entreprises privées fortement implantées dans la région. La tactique consiste à éviter une perte totale de contrôle, tout en acceptant un changement de cap pour s’adapter à une nouvelle configuration géopolitique.
Une prise de conscience effective et une rupture inévitable?
Le changement est perceptible dans le discours et dans les gestes diplomatiques. Lors d’un épisode marquant, le 30 juin 2025, lors de la Conférence de Séville consacrée au financement du développement, le président Emmanuel Macron a rapidement twitté pour annoncer une rencontre avec le président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye. Son message témoignait d’une tentative de repositionnement du partenariat entre Paris et Dakar : « … En pleine refonte, le partenariat entre le Sénégal et la France doit nous permettre d’avancer ensemble au service des intérêts de nos peuples et de notre souveraineté. » Il a également évoqué la nécessité d’un partenariat qui couvre plusieurs domaines, allant de l’économie à la sécurité, en passant par la coopération culturelle et mémorielle.
Ce comportement de la France traduit une reconnaissance implicite du fait que ses relations avec le Sénégal ont changé et qu’elle doit s’adapter à cette nouvelle donne. Toutefois, dans l’ombre de ces déclarations, se profile une stratégie de préservation des intérêts français dans le pays. La pression économique, notamment celle exercée par les entreprises privées françaises, pèse considérablement dans cette équation. La nécessité de protéger ces investissements tout en évitant une rupture totale influence la politique étrangère française en Afrique, et surtout au Sénégal.
Une tendance forte se dessine : la France semble désormais courir après le Sénégal, plutôt que d’être en position de domination. La récente intervention du président Macron lors de la Conférence de Séville en attestait, avec ses déclarations sur la nécessité de « faire avancer ensemble » le partenariat, pour « l’intérêt de nos peuples et de notre souveraineté ». Ce langage de coopération et de dialogue s’inscrit dans une volonté de maintenir une influence, tout en acceptant un changement de paradigme.
Pourtant, dans cette configuration, il appartient aux États africains comme le Sénégal de continuer à assumer leur nouvelle posture de souveraineté. Il est crucial pour eux d’affirmer leur indépendance en multipliant les gestes symboliques et diplomatiques, notamment en tenant à distance la France et en montrant leur volonté de nouer des relations équilibrées, respectueuses de leur autonomie nationale. La stratégie pourrait alors consister à laisser Paris courir après Dakar, tout en consolidant leur propre pouvoir et en façonnant de nouvelles alliances internationales.
En définitive, la seule certitude à ce stade est que le rapport de force évolue en faveur des pays africains, qui commencent à écrire leur propre histoire plutôt que de rester dans l’ombre de l’ancien empire colonial. Le Sénégal, en particulier, a là une opportunité historique de s’affirmer pleinement sur la scène internationale, en se montrant maître de sa destinée, quitte à faire face à la France dans une relation désormais repensée.