Les nouvelles drogues au Sénégal : une menace croissante qui provoque de nombreux décès

10 juillet 2025

Dans le cadre de la semaine nationale consacrée à la sensibilisation et à la mobilisation contre la consommation de drogues, une session de débat et d’échange a été organisée au Centre régional de recherche et de formation à la prise en charge clinique de Fann (CRCF). Lors de cet événement, le Dr Ibrahima Ndiaye, représentant du Centre pour l’Etude et la Prévention des addictions (Cepiad), a souligné que toutes les nouvelles substances interdites sont désormais présentes sur le territoire sénégalais, engendrant de nombreux décès parmi la population.

Les nouvelles substances synthétiques provoquent une dégradation importante de la santé des jeunes Sénégalais. Le Dr Ndiaye a insisté sur la gravité et les dangers liés à ces produits, notamment le Kush, une drogue de synthèse qui fait actuellement des ravages dans le pays. Selon ses mots, ces nouvelles drogues sont désormais omniprésentes au Sénégal, ce qui entraîne un nombre conséquent de décès. Il a indiqué que plusieurs cas mortels liés à la consommation de Kush ont été recensés récemment.

Le Kush est une mixture composée de nitazène – un opioïde de synthèse extrêmement puissant, 25 fois plus fort que la fentanyl –, un composant qu’il qualifie d’extrêmement toxique. Il explique que cette drogue de synthesis a été détectée pour la première fois en Sierra Leone à la fin des années 2010, avant de s’étendre rapidement à travers toute la région ouest-africaine. « C’est un produit très dangereux, susceptible de provoquer une dépendance », avertit-il. Une seule ingestion suffit parfois pour provoquer une intoxication grave. Les personnes ayant consommé cette substance présentent souvent des troubles neurovégétatifs aigus, ainsi que des symptômes neurologiques ou psychiatriques. Dr Ndiaye déplore également le manque de vigilance lors des diagnostics médicaux. « Lorsqu’ils reçoivent des patients, de nombreux professionnels de santé ne pensent pas systématiquement à demander si la personne a consommé du Kush », regrette-t-il.

Pour faire face à cette crise grandissante, l’expert en addiction recommande qu’une évaluation rapide de la situation soit entreprise. Il insiste sur la nécessité de favoriser l’échange d’expériences entre les différents pays de la sous-région, notamment à travers la sensibilisation et la formation du personnel médical et paramédical, ainsi que de tous les autres acteurs concernés tels que les autorités et les populations. « Le Kush est aujourd’hui plus accessible que le cannabis, et de nombreux décès liés à ses effets toxiques ont été signalés suite à des crises chez les patients », précise-t-il. Il ajoute que cette substance est en circulation dans plusieurs pays voisins, notamment la Guinée, la Guinée-Bissau, la Gambie, et évidemment le Sénégal.

Le rôle des autorités pour stopper la progression du Kush

Selon lui, certaines interventions thérapeutiques peuvent s’avérer efficaces lors des premiers moments d’une intoxication aiguë, telles que l’administration d’anxiolytiques ou la prise en charge des crises présentant des signes organiques, comme l’avalement involontaire de la langue ou l’hypotonie, en dehors de toute nouvelle consommation. Il explique également que certains patients manifestent des symptômes dès la première utilisation, tandis que d’autres développent une crise après plusieurs doses répétées ou une consommation prolongée.

L’un des aspects préoccupants évoqués par le spécialiste est la jeunesse des consommateurs. « La majorité d’entre eux sont des mineurs, principalement de nationalité étrangère, même si l’on rencontre parfois des jeunes Sénégalais. » Il a cité à titre d’exemple le cas d’un jeune patient de seulement 14 ans, qui a été hospitalisé suite à une crise grave due au Kush. Face à cette réalité alarmante, il lance un appel pressant aux autorités du pays. Selon lui, il est impératif que des mesures concrètes soient rapidement prises pour limiter la propagation de cette drogue mortelle. « Sur le plan hospitalier, nous envisageons déjà des activités interventionnistes, mais il est crucial que les autorités soutiennent ces initiatives pour qu’elles puissent être déployées rapidement », insiste-t-il. Il évoque également la crainte que des actions de prévention ou de contrôle arrivent trop tard, lorsque la crise sera déjà bien installée. « Nous ne pouvons agir efficacement que si nous bénéficions d’un appui solide de nos institutions », conclut-il. Selon le Dr Ndiaye, le personnel médical et paramédical possède la compétence et la motivation, mais il manque souvent de moyens et de soutien pour faire face à cette menace croissante.