Le marché reprend des couleurs au Sénégal : tendance positive et perspectives économiques

17 juillet 2025

Les marchés financiers au Sénégal ont connu lundi une embellie notable, suite à une annonce du ministère des Finances selon laquelle une révision des données économiques du pays pourrait conduire à une amélioration des ratios de la dette nationale. Cette nouvelle a insufflé un élan d’optimisme parmi les investisseurs, alors même que l’agence de notation S&P Global Ratings venait tout juste de dégrader pour la deuxième fois en l’espace de cinq mois la note souveraine du Sénégal.

Les obligations libellées en dollars, avec une échéance fixée à 2033, ont enregistré une baisse marquée de leurs rendements, qui ont chuté de 31 points de base pour s’établir à 13,45 %. Ce mouvement a permis de s’éloigner des niveaux record atteints peu après l’annonce du dernier déclassement de la note par S&P, d’après les données de Bloomberg. La réaction du marché s’explique en grande partie par la déclaration du ministère des Finances concernant un éventuel recalcul ou rebasage du produit intérieur brut (PIB), une opération qui devrait être finalisée « dans les prochains mois ».

S&P a procédé à une baisse de la note du Sénégal, la faisant passer de B à B-, ce qui place le pays à son niveau le plus faible depuis le début des évaluations par l’agence en 2000. La décision a été motivée par la constatation d’un endettement supérieur aux prévisions, avec un ratio dette/PIB qui aurait bondi à 119 % en 2024, selon les dernières données budgétaires citées par Barclays. Ce chiffre dépasse largement les 99,7 % annoncés pour 2023, ce qui accentue le contexte de fragilité financière.

La récente audit des finances publiques, menée par l’administration du président Bassirou Diomaye Faye, a notamment révélé des manipulations comptables effectuées par le précédent gouvernement dirigé par Macky Sall. Ces révélations ont conduit le Fonds monétaire international (FMI) à suspendre en octobre dernier le programme d’aide financière de 1,8 milliard de dollars destiné au Sénégal. La suspension a été une réaction à la découverte de pratiques comptables douteuses qui ont fragilisé la crédibilité financière du pays.

Cependant, les discussions entre le Ghana et le FMI se poursuivent, et celles-ci ont été qualifiées de « constructives » par le ministère des Finances. Selon Marco Ruijer, gestionnaire de portefeuille chez William Blair Investment Management, « beaucoup de mauvaises nouvelles sont déjà connues et ont déjà été prises en compte dans les prix du marché, donc la dégradation elle-même n’a peut-être pas été une surprise totale ». Ces propos reflètent une certaine résilience des investisseurs face aux turbulences.

Le processus de rebasage du PIB, en préparation depuis un certain temps, doit permettre d’obtenir une image plus fidèle de la taille réelle de l’économie sénégalaise, a indiqué le ministère des Finances dans une communication par courriel en réponse à la dégradation de S&P. En ajustant la base statistique, cette opération pourrait mécaniquement améliorer certains ratios d’endettement, en augmentant la valeur estimée du PIB.

Marco Ruijer a souligné que « cela pourrait potentiellement améliorer certains indicateurs de la dette et ouvrir la voie à l’obtention d’un nouveau programme avec le FMI », en faisant référence à cette opération de rebasage. Toutefois, malgré cet optimisme, le Sénégal doit faire face à des besoins de financement exceptionnels estimés à environ 2 milliards de dollars, tel qu’indiqué dans le projet de loi de finances pour 2025. La suspension du programme du FMI a encore restreint ses accès aux marchés internationaux de capitaux, contraignant le pays à se tourner vers des emprunts plus coûteux et à chercher des fonds auprès du marché régional ouest-africain des valeurs mobilières (BRVM).

L’agence d’évaluation justifie sa récente décision en soulignant que « malgré des perspectives de croissance encore solides », la situation budgétaire du Sénégal est désormais perçue comme plus fragile. Selon S&P, cette vulnérabilité rendrait les finances publiques sénégalaises plus exposées aux chocs économiques ou financiers futurs. En conséquence, l’agence estime que la dette du pays atteindra désormais 118 % du PIB pour l’année 2024.

Malgré ces préoccupations, le ministère des Finances a insisté sur le fait que le Sénégal a réussi à mobiliser « des ressources substantielles » auprès de partenaires étrangers ainsi que sur le marché obligataire local depuis le début de l’année. Cela témoigne, selon eux, d’une certaine confiance de la part des investisseurs, en dépit des turbulences économiques et financières qui secouent actuellement le pays.