L’élection de Bassirou Diomaye Faye, c’était censé être le coup de sifflet final d’un long match de désillusions. Une bouffée d’air frais, un renouveau, un vent de jeunesse pour secouer un pays qui suffoquait sous le régime Macky Sall. Et pourtant, six mois après le coup d’envoi, les Sénégalais regardent leur président et son Premier ministre Ousmane Sonko comme deux attaquants pris en flagrant délit d’impuissance face aux multiples crises qui étouffent le pays. À l’image d’un match mal embarqué, le jeu dérape, et l’espoir du changement commence à filer entre les doigts des supporters les plus fervents.
Diomaye et Sonko : l’espoir d’une jeunesse déçue
La victoire de Diomaye Faye dès le premier tour avait des allures de but en or : PASTEF, le parti des jeunes, des patriotes, enfin aux commandes. Avec Sonko en tête de file, l’idole des tribunes, celui qui a fait trembler Macky Sall et renoncé à sa propre candidature pour laisser le terrain à son coéquipier. Diomaye, le gars tranquille, l’avocat des paysans, celui qu’on ne voyait pas forcément dans le onze de départ. Mais la magie de la politique a opéré. Le président, c’est lui. Le Premier ministre, c’est Sonko. Le tandem est en place, les attentes sont énormes. Sauf que sur le terrain, la réalité est bien différente. Le match est compliqué, la pression monte, et les promesses de campagne ressemblent de plus en plus à de belles paroles entendues dans les vestiaires avant le coup d’envoi.
Le Sénégal est à genoux. Entre des contrats pétroliers flous, une gestion du foncier qui fait grincer des dents, et une fonction publique qui ne semble plus tourner rond, le terrain est miné. Dakar brille avec ses immeubles et ses infrastructures dernier cri, mais derrière les vitrines, c’est la misère qui règne. Loyers exorbitants, coût de la vie qui explose, chômage en plein boom… c’est invivable. Diomaye et Sonko découvrent qu’être à la tête d’un État, c’est jouer avec une balle bien plus lourde que prévu. Macky Sall leur a laissé un ballon plombé, et chaque passe devient une nouvelle galère à gérer.
Redressement, décollage, stabilisation : le trio gagnant ou la promesse d’un échec ?
Sur le banc, les supporters commencent à grogner. Vendredi 13 septembre, Diomaye Faye va s’adresser à la nation. Pas pour un tour d’honneur, non, mais pour un bilan de mi-temps qui s’annonce difficile. Les Sénégalais, eux, ne s’attendent pas à des miracles. Ils savent que la victoire n’est pas pour demain. Entre les jeunes qui préfèrent se jeter à l’eau vers l’Europe plutôt que de crever à petit feu ici, et ceux qui s’abrutissent dans l’alcool ou la drogue pour oublier un quotidien sans issue, le pays plonge doucement dans le chaos. « Barsakh » n’est plus une menace mais une destination acceptée. Mourir pour un rêve, quitte à finir au fond de l’océan, c’est peut-être mieux que survivre dans ce marasme.Pendant ce temps, le Premier ministre Ousmane Sonko tente de gérer l’impatience croissante des supporters. Il a déjà annoncé la couleur : « Le président va s’adresser à la Nation dès son retour. Et il dira aux Sénégalais l’état dans lequel nous avons trouvé ce pays. Les ministres prendront le relais pour donner les explications détaillées. C’est important de faire cet état des lieux. Nous aurons une phase de redressement du pays, une phase de décollage et une phase de stabilisation. » Une vraie déclaration d’avant-match, qui ressemble plus à une promesse de reconstruction après une grosse blessure qu’à un plan pour marquer tout de suite. Parce que c’est bien ça, le problème. Redressement, décollage, stabilisation… des termes qui sonnent comme des phases défensives, des promesses de colmater les brèches sans vraiment attaquer.
Mais les Sénégalais, eux, veulent du concret. Ils attendent des résultats, pas des excuses. Ils voient leur jeunesse sombrer. Ils entendent les cris d’une génération « Goulou-Goulou », ce terme devenu viral qui résume l’abandon dans l’alcool pour ne pas affronter la réalité. Ils voient les disparitions en mer, les agressions, les accidents de la route, et se demandent : à quand le coup de génie, la passe décisive qui permettra à Diomaye et Sonko de redresser la barre ? Pour l’instant, le compteur reste bloqué à 0-0, et les prolongations s’annoncent longues, très longues.