Le chef de la junte guinéenne, le colonel Mamady Doumbouya, s’est livré jeudi à l’ONU à une défense ardente de l’intervention des militaires en politique après une succession de putschs en Afrique, et a proclamé l’échec du modèle démocratique occidental sur le continent.
« L’Afrique souffre d’un modèle de gouvernance qui nous a été imposé, un modèle certes bon et efficace pour l’Occident, qui l’a conçu au fil de son histoire, mais qui a du mal à passer et à s’adapter à notre réalité », a-t-il déclaré devant l’Assemblée générale de l’ONU.
« Hélas, j’aimerais dire que la greffe n’a pas pris », a-t-il ajouté.
Par sa propre expérience depuis 2021, il a « mieux mesuré à quel point ce modèle a surtout contribué à entretenir un système d’exploitation et de pillage de nos ressources par les autres, et une corruption très active de nos élites », a-t-il dit.
Le colonel Doumbouya a conduit le coup d’Etat militaire qui a renversé le président civil Alpha Condé le 5 septembre 2021. Il s’est depuis fait investir président pour une période supposée transitoire.
Ce coup de force militaire est l’un des nombreux qu’a connus l’Afrique depuis 2020, avec le Mali, le Burkina Faso, et, en 2023, le Niger et le Gabon. Le colonel Doumbouya est a priori le seul des chefs de ces coups d’Etat à s’exprimer cette année à l’ONU.
Délaissant exceptionnellement l’uniforme et le béret pour un large boubou blanc et une toque, il s’est défendu d’être « encore un bidasse qui veut tordre le cou à la démocratie, encore un soldat qui veut imposer sa dictature ».
« Le putschiste n’est pas seulement celui qui prend les armes, qui renverse un régime », a-t-il dit. « Les vrais putschistes, les plus nombreux, qui ne font l’objet d’aucune condamnation, c’est aussi ceux qui manigancent, qui utilisent la fourberie, qui trichent pour manipuler les textes de la Constitution afin de se maintenir éternellement au pouvoir », a-t-il dit en faisant référence à la situation dans différents pays.
Lui-même dit être passé à l’action en Guinée « pour éviter à notre pays un chaos complet ».
La Guinée avait alors connu des mois de contestation contre la modification de la Constitution par le président Condé et sa candidature et sa réélection à un troisième mandat.
Il a invoqué à la fois la maturité et la jeunesse d’Afrique pour appeler à rompre avec l’ancien ordre mondial tout en défendant le non-alignement.
« L’Afrique de papa, la vieille Afrique, c’est terminé », a-t-il dit.
« C’est le moment de prendre en compte nos droits, de nous donner notre place. Mais aussi et surtout le moment d’arrêter de nous faire la leçon, de nous prendre de haut, d’arrêter de nous traiter comme des enfants », a-t-il dit.
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