Alors que l’Aser se retrouve au cœur d’une controverse du fait d’un contrat indûment accordé, de nombreuses questions restent à élucider. En bonne place figure la non effectivité du Comité de règlement des différends, organe qui devrait arbitrer les contentieux du genre en lieu et place de l’Agence de régulation de la Commande publique (ARCOP).
Le dossier ASER/ARCOP remet en surface la lancinante question de la transparence dans l’attribution des marchés publics. Le tollé provoqué par la décision de l’Agence de régulation de la Commande publique de retoquer l’attribution par l’Aser d’un marché à EE POWER EPC est révélateur de l’exigence de clarté dans la gestion des affaires publiques, comme le chante le « JUB, JUBAL, JUBBANTI ».
Cependant, on a comme l’impression que les choses ne démarrent pas comme souhaité. En six mois, il faut reconnaitre qu’on pourrait bien se passer d’un tel débat qui, à tort ou à raison, pourrait mettre le doute dans la tête de certains citoyens épris de justice, d’éthique et d’équité. L’un des moyens d’y parvenir se trouve dans le projet de décret instituant la Commission de régulation du secteur de l’Energie, et il urge d’en user.
En effet, la mise en place de Comité de règlement des différends (CRD) est une grande avancée dans la recherche de transparence dans la conduite des affaires publiques. Contenu dans le Projet de décret 2022-1593 du 12 septembre pris en application de l’article 14 de la loi 2021-32 portant organisation, fonctionnement et attributions de la Commission de Régulation du Secteur de l’Energie (CRSE). le CRD est un outil bien pensé dans sa composition et dans ses fonctions. Son installation devrait permettre de créer un environnement d’attribution des marchés serein si l’on en juge l’expertise qui la compose.
En effet, l’article 23 dudit projet stipule que « Le CRD est composé de cinq (05) membres appelés conseillers. Ils sont nommés par décret sur proposition du Conseil de Régulation, pour une durée de trois (03) ans non renouvelable. Le CRD est composé comme suit : – un membre du Conseil de Régulation ; – un conseiller magistrat ; – un conseiller issu du Comité Consultatif de l’Administration ; – un conseiller issu du Comité Consultatif des Operateurs ; – un conseiller issu du Comité Consultatif des Consommateurs ». Cette composition rend l’organe toute une légitimité et une bonne présomption d’éthique dans ses différentes missions.
L’articles 22 précise : « Le Comité de Règlement des Différends (CRD) est un organe indépendant au sein de la CRSE ».
Sur ses missions justement, l’Articles 25 du texte indique : « Le CRD est chargé : – d’instruire les plaintes de toute personne physique ou morale intéressée relative au non-respect de disposition d’une réglementation sectorielle relevant du champ de compétence de la CRSE ; – d’instruire et se prononcer sur les recours exercés par les candidats ou soumissionnaires ou demandeurs de licence dans Ie cadre des procédures mises en œuvre en vue de I ‘obtention d’un titre d’exercice d’une activité règlementée ; – de régler les différends entre les acteurs du secteur de l’électricité, du secteur aval des hydrocarbures et des segments intermédiaire et aval gaziers ».
A la lumière de cet article du texte, il apparait clair que l’ARCOP ne devait pas arbitrer ce contentieux ASER si tous les organes de la CRSE étaient opérationnels. Le cas échéant, les nouvelles autorités se seraient bien épargnées de cet environnement toxique dans leur prêche de transparence absolue.
En effet, lors de la troisième Revue annuelle de la Feuille de Route Électricité du Sénégal le 3 octobre 2024, les conclusions ont fait ressortir le retard accusé par la signature du décret formalisant le Comité de Règlement des Différends (CRD) de la Commission de Régulation du Secteur de l’Énergie (CRSE) depuis le mois de janvier 2024.
Pourquoi ce blocage ?
Pourtant, entre autres recommandation, il ressort que la mise en place formelle de du Comité de règlement de différents (CRD) est impérative pour le renforcement de la régulation. De ce point de vue, il urge de le mettre en place afin d’assurer toute l’indépendance et la transparence que requiert l’arbitrage des contentieux autour des marchés publics de l’Énergie.
Au-delà du bruit qui entoure le départ de son ancien directeur et l’absence d’appel à candidatures pour le remplacer, l’ARCOP ne devrait même pas gérer des différends comme le problème de l’ASER alors que le Comité de Règlement de la CRSE doit être l’organe dédié pour résoudre les contentieux dans le secteur de l’énergie.
Il se susurre que le décret formalisant le CRD n’est toujours pas signé. Et pourtant c’est là que réside les vrais outils du « JUB, JUBAL, JUBBANTI » dans le secteur de l’énergie. De ce point de vue, la signature du décret doit se faire sans tarder et la mise en place du CRD effective au moment où le Sénégal entrevoit l’exploitation de ses ressources gazières et pétrolières.
Khalifa A. Gaye